Il y a moins d’un an, nous nous faisions le relais d’une étude portant sur l’adoption des cryptomonnaies dans le monde. Un classement dans lequel le Kenya figurait en tête de l’Afrique pour ce qui est du taux d’adoption (8,5%), devant le Nigeria. Et bien que l’on pointait déjà que les Nigérians étaient, en nombre absolu, les plus grands amateurs de bitcoins et autres devises numériques, il semble que la part de la population qui succombe à cette tendance ne fasse que grandir également.
Selon l’enquête que vient de publier l’accélérateur Chapter54 et Ledger, un leader mondial des solutions de sécurité, 18% des adultes nigérians déclarent posséder ou avoir utilisé des crypto-monnaies, ce qui représente 39 millions de personnes. D’ailleurs, le Nigeria, presque tout le monde sait de quoi on parle. L’enquête révèle que 93% des répondants connaissent les cryptomonnaies, même de nom, alors que seulement 7% de l’échantillon n’en ont jamais entendu parler. Il s’agit d’un niveau de sensibilisation significatif parmi les utilisateurs d’internet au Nigeria.
Mais au-delà de ce chiffre du nombre de détenteurs, qui varie fortement d’un rapport à l’autre, ce sont les usages qui font l’intérêt de cette étude : celle-ci met, en effet, en lumière les facteurs favorisant leur adoption, notamment le désir de générer des revenus (39%), de se prémunir contre la volatilité des devises (24%) et de diversifier les investissements (20%).
Diversifier ses placements, générer des revenus… Mais comment les Nigérians s’informent-ils sur les cours, par exemple ? Les trois quarts par les réseaux sociaux – des influenceurs tels que Jude Umeano (YouTube) et Tola Joseph (Twitter) jouent un rôle clé dans la diffusion d’informations sur les cryptomonnaies. Près de la moitié font confiance à leurs proches / amis – les blogs et les médias arrivent loin derrière.
Plus de la moitié s’informent moins d’une fois par mois, bien que 19% y consacrent du temps chaque jour – un chiffre qui correspond peu ou prou au nombre de détenteurs indiqué ici.
Il est finalement assez peu étonnant que le côté spéculatif ressorte des usages – la moitié des crypto des Nigérians sont d’ailleurs stockés sur les plateformes d’échange. À l’automne dernier, une autre étude, de Chainalysis cette fois, notait que “de nombreux jeunes d’Afrique subsaharienne se tournaient vers la cryptomonnaie comme moyen de préserver et de créer de la richesse malgré de faibles opportunités économiques, contrairement à d’autres pays où nous voyons beaucoup [de gens] l’utiliser comme moyen de multiplier leur richesse existante”. Avec le risque de mettre en péril les finances du foyer.
Ce constat appelle, plus qu’ailleurs, une sérieuse régulation. Mais comme d’autres, les autorités nigérianes naviguent à vue dans le domaine. Si elles avaient interdit aux institutions bancaires d’y mettre mes doigts, elles ne sont pas totalement fermées aux cryptoactifs. Entre l’échec du e-Naira, cette devise de banque centrale lancée en octobre 2021, et les problèmes de liquidité que connaît le pays, le nouveau président Bola Tinobu, qui prête serment ce lundi 29 mai, devra sérieusement se pencher sur le dossier.