[Article issu de la Newsletter] Nouvelle polémique au Rwanda pour Paul Kagame. À deux semaines de l’élection présidentielle où il brigue un quatrième mandat, le président sortant fait face à des accusations de la part d’universitaires américains. Ces derniers affirment qu’il aurait employé un large réseau de comptes automatisés sur les réseaux sociaux grâce à l’intelligence artificielle pour influencer l’opinion publique.
L’objectif de cette stratégie est clair : amplifier certains sujets, promouvoir un large réseau de soutien à Kagame et évincer les messages critiques à l’égard du gouvernement.
“Vieux despotes, nouvelles techniques” est le titre sans équivoque de l’étude menée par trois chercheurs du Media Forensics Hub à l’Université Clemson, en Caroline du Sud, États-Unis. Publiée le 20 juin 2024, cette étude détaille comment une campagne d’astroturfing, terme désignant l’utilisation de techniques de propagande manuelles ou algorithmiques à des fins publicitaires, politiques ou de relations publiques, aurait généré 464 faux comptes sur X/Twitter, lesquels auraient envoyé 650 000 messages depuis janvier 2024.
Ces messages auraient été grandement aidés par l’utilisation de chatbots basés sur de grands modèles de langage (LLM) tels que ChatGPT d’OpenAI et par des outils de génération d’images synthétiques.
Ces posts, d’apparence indépendants les uns des autres mais en réalité issus d’une campagne finement coordonnée, soutiennent la position du Rwanda sur le conflit en RDC ainsi que celle des rebelles du M23, soutenus par le régime de Paul Kagame.
Le réseau a été découvert par les chercheurs alors qu’ils étudiaient le cas de l’affaire “Rwanda Classified” du collectif de médias Forbidden Stories. Ce collectif, composé de 50 journalistes, a enquêté et démonté le système de soft power mis en place par Kigali et son implication dans la mort du journaliste John Williams Ntwali.
“Sur la base de nos recherches, il est apparu clairement que les comptes associés au réseau utilisaient le hashtag #RwandaClassified pour discréditer l’enquête journalistique,” ont conclu les chercheurs.
Il s’agit de l’une des premières occurrences révélées d’un usage aussi large d’outils d’IA générative à des fins de manipulation de l’opinion par un président en exercice. La désinformation ne provient malheureusement pas seulement des hackers, hacktivistes et fermes à trolls russes…