L’Afrique du Sud est sans conteste le meilleur pays d’Afrique pour un internaute. Pour les lectrices et les lecteurs de notre newsletter, on ne vous apprend rien : c’était la conclusion principale de notre analyse de deux récents rapports, le Digital Quality of Life Index 2022 de l’éditeur néerlandais de VPN Surfshark et le 2022 Speedtest Global Index réalisé par la société états-unienne Ookla, tout deux publiés fin septembre. Le premier classe les pays en fonction de plusieurs aspects tels que l’accessibilité de l’internet, sa qualité, les infrastructures télécoms, la sécurité numérique et la gouvernance numérique. Le second ne prend en compte que la rapidité – médiane et moyenne – de l’internet mobile et de l’internet haut-débit.
Pourtant, après avoir épluché ces études et quelques autres, nous aimerions ici apporter de la nuance et offrir d’autres éléments d’analyse sur l’état de l’accès à l’internet et la qualité de connexion à l’échelle de l’Afrique.
Mais d’abord, attaquons-nous au géant de l’Afrique australe. Si l’on peut affirmer sans sourciller que l’Afrique du Sud est la championne africaine de l’internet, c’est parce que le pays est :
- 1er pays africain selon l’indice de qualité de vie numérique de Surfshark (0.4131 points)
- 1er pays africain pour la rapidité de ses réseaux mobile, d’après Ookla (38,11 Mb/s de vitesse médiane, 68,93 Mb/s de moyenne)
- 1er pays africain pour la rapidité moyenne de ses réseaux haut-débit, d’après Ookla (67,77 Mb/s)
- 3e pays africain pour la rapidité médiane de ses réseaux haut-débit, d’après Ookla (36,11 Mb/s)
- MTN Afrique du Sud, 1er réseau africain en termes de rapidité médiane au deuxième trimestre 2022, d’après Ookla (65,95 Mb/s)
- Vodacom Afrique du Sud, 2e réseau africain en termes de rapidité médiane au deuxième trimestre 2022, d’après Ookla (48,71 Mb/s)
- Vodacom et MTN à Johannesburg et au Cap occupent les quatre premières places des réseaux urbains les plus rapides au deuxième trimestre 2022, d’après Ookla
Voilà pour les statistiques. Une autre société d’analyse, UmlauT, a elle aussi récemment couronné les opérateurs sud-africains pour être les plus rapides du continent, rapporte le site Techpoint Africa.
Néanmoins, en complément de son indice, Ookla a émis des réserve, précisant que la rapidité des connexions en Afrique du Sud est grandement due au fait que le pays possède l’un des réseaux 5G le plus anciens et les plus denses, sur un continent qui est encore très largement habitué à la 4G, voire à la 3G. « Si l’on exclut la 5G de l’équation, Safaricom Kenya est l’opérateur le plus rapide parmi les opérateurs analysés », indique d’ailleurs dans le rapport Sylwia Kechiche, analyste principal chez Ookla.
Techpoint Africa note aussi que la société britannique Cable.co.uk n’a placé l’Afrique du Sud qu’en troisième position des réseaux les plus rapides, avec 28,62 Mb/s. Selon ses calculs, le Rwanda, est devant, avec 52,17 Mb/s – ainsi que la Réunion, mais celle-ci n’est pas comptabilisée indépendamment de la France dans les autres études. Cela permet en tout cas de relativiser les conclusions que l’on peut tirer d’une seule étude.
Mais attention, comme nous le précisions dans notre newsletter, cette domination ne doit pas faire oublier un tableau plus général bien moins réjouissant : à l’échelle mondiale, l’Afrique du Sud n’est que 66e au classement de la « qualité de vie numérique » de Surfshark, 47e et 46e pour la rapidité de ses réseaux mobiles, et 96e et 84e pour celle de son haut-débit…
Et encore, le pays est un peu l’arbre relativement vigoureux qui cache une forêt africaine bien plus moribonde. A titre d’exemple, le Sénégal, 10e pays africain en termes de « qualité de vie numérique », ne figure qu’à la 95e place à l’échelle mondiale. Et l’on ne vous parle même pas des mauvais élèves africains, qui végètent tout en bas du classement.
Pour les classements de vitesse de connexion, même chose : le Ghana se retrouve en 136e place pour la vitesse moyenne des réseaux mobiles, et le Soudan, 178e pour la vitesse moyenne des réseaux haut-débit. Mais c’est peut-être quand on prend les classements par opérateurs et par réseaux nationaux que l’on voit le mieux la grande disparité du continent : en effet, si MTN peut se targuer d’une connexion médiane à 65,95 Mb/s en Afrique du Sud, d’après Ookla, l’opérateur n’offre que 2,89 Mb/s de connexion médiane en Guinée. Un sacré grand écart !
Sans compter que les coupures d’électricité et la censure d’internet, à laquelle la moitié des dirigeants du continent continuent de s’adonner, plombent grandement la qualité de la connexion et le prix faramineux de certains réseaux nationaux, comme en Ouganda, est un frein majeur à l’adoption d’internet.