Nigeria : la Banque centrale peut-elle mettre au pas les cryptomonnaies ?

Fini de jouer. Vendredi 5 février, la Banque centrale du Nigeria (CBN) a demandé aux banques du pays de fermer tous les comptes utilisant des cryptomonnaies. Dans une note publiée sur son site, l’organisme « rappelle aux institutions financières qu’utiliser des cryptomonnaies ou faciliter les paiements impliquant celles-ci est interdit ». Elle demande ainsi « d’identifier les personnes ou entités utilisant des cryptomonnaies » afin « de fermer immédiatement leurs comptes ». Sans quoi de « sévères sanctions » seraient prises.

La mise au ban des cryptomonnaies au Nigeria date d’un décret de janvier 2017. Mais cette interdiction n’a pas vraiment été respectée. Le Nigeria est même devenu l’un des pays comptant le plus d’adeptes des monnaies virtuelles au monde. En 2020, il s’échangeait pour près de 25 millions de dollars en bitcoins par mois dans le pays. Loin devant le Kenya ou l’Afrique du Sud. Les cryptomonnaies ont aussi servi à lever des fonds pour soutenir le mouvement #EndSars contre les violences policières, Un financement soutenu par le patron de Twitter lui-même.

Les startups veulent rassurer

Si l’appel de la Banque centrale nigériane est suivi d’effets, ce sera un coup dur pour toutes les sociétés d’achat de cryptomonnaies qui ont (parfois) pignon sur rue dans le pays, telles que YellowCard (US) ou BuyCoins. Cette dernière a d’ailleurs rapidement réagi sur Twitter : « Merci à tous ceux qui nous ont contactés. Nous sommes pleinement conscients de la dernière circulaire du CBN et nous allons travailler avec les régulateurs pour nous assurer que nos services sont conformes. Tous les échanges sur nos plateformes se poursuivent comme d’habitude et tous les fonds des utilisateurs sont en sécurité. »

Des sources dans le secteur ont fait savoir au site TechCabal, que ces acteurs étaient plutôt dans une position d’attente. « Au Nigéria, la réaction typique lorsque les régulateurs adoptent des règles strictes est d’obéir d’abord et de négocier ensuite », s’amuse le média spécialisé dans les nouvelles technologies. Reste que cette décision risque d’affecter pour un temps les achats et retraits de cryptomonnaies dans le pays. Dans la foulée de celle-ci, YellowCard a d’ailleurs déclaré qu’elle suspendait les dépôts d’argent, mais qu’elle était toujours bien active au Nigeria.

Enième coup de semonce

D’autant que ce n’est pas la première fois que la Banque centrale tape du poing sur la table ces dernières années. En 2018, alors que le cours du bitcoin flambait, elle avait émis une note dans laquelle elle réaffirmait l’interdiction des cryptomonnaies, sans toutefois préciser quelles en seraient les conséquences.

« Les membres du public sont avertis que les monnaies virtuelles n’ont pas cours légal au Nigeria. En conséquence, nous tenons à mettre en garde contre les risques inhérents à de telles activités », prévenait l’institution, précisant que les « marchants et les investisseurs » en tout type de cryptomonnaie au Nigeria n’étaient « pas protégés par la loi ».

Conséquences et migrations

La nouvelle directive de la Banque centrale aura néanmoins plus de conséquences. Si les banques coopèrent effectivement, on assistera à une migration massive des utilisateurs de cryptomonnaies en dehors du système bancaire traditionnel. Une migration qui pourrait néanmoins être ralentie en cas de zèle des établissements, affirme de le site Nairametrics, qui pourraient bloquer tout transfert depuis les comptes visés. Il suffit de voir le nombre de questions posées sur les réseaux sociaux à des acteurs comme YellowCard ou BuyCoins pour constater la fébrilité qui s’est emparée des utilisateurs.

Comme nous l’avons vu, les achats et retrait en argent auprès des agents présents dans le pays pourraient aussi être perturbés. Mais il est fort à parier que l’on assiste à une réorganisation des pratiques des Nigérians dans le domaine. Car l’appétit pour des monnaies virtuelles est croissant dans le pays. Peu importe les fluctuations, parfois très importantes, c’est un engouement qui ne se dément pas. Valeurs refuges pour certains, mais surtout moyens de transferts d’argent ou de paiement, les cryptomonnaies ont encore de beaux jours au Nigeria.

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