Le sud et le nord de l’Afrique devraient voir, dans un futur proche, se multiplier les périodes de sécheresses. Sur les bords de la Méditerranée et le nord du Sahara, comme en Afrique australe, les pluies se font toujours plus attendre, et cela ne fera que qu’empirer. Dans d’autres endroits, les averses diluviennes – et leurs lots d’inondations – sont plus fréquentes. Face à cela, le continent africain peut à première vue paraître bien démuni : faible développement, accès limité à l’énergie et forte dépense de celui-ci aux aléas climatiques. Mais ces faiblesses peuvent devenir des forces, nous dit le dernier rapport Africa’s Pulse de la Banque mondiale.
« Dans une région où une grande partie des infrastructures, des villes et des systèmes de transport restent à construire, les investissements dans des infrastructures intelligentes face au changement climatique peuvent aider les villes à créer des emplois », assurent les auteurs du document. En effet, dans bien des pays, beaucoup reste à faire que cela soit dans la production d’énergie où l’organisation des villes et des déplacements. Une opportunité qu’il faut saisir vite et bien – entendez avec des investissements massifs – car le coût de l’inaction serait bien plus élevé : un réchauffement planétaire de 3 °C d’ici 2100 pourrait faire perdre 2,5 trillions d’euros au continent, selon de récentes projections.
Comment réajuster le tir ? « Des politiques urbaines qui tiennent compte du climat peuvent aider les gouvernements locaux à utiliser leurs financements publics limités pour attirer des investissements du secteur privé en s’attaquant à des problèmes tels que la pollution, les inondations, la chaleur extrême et l’accès à l’énergie. […] Des données récentes indiquent que les pays africains ont besoin d’investir dans des villes plus compactes, propres et connectées », poursuit le rapport.
Et le pari serait payant, d’un point de vue financier : ainsi, un investissement à hauteur de 184 milliards d’euros dans les villes sud-africaines rapporterait les plus gros bénéfices pour un investissement de ce type en Afrique, avec un retour évalué à 600 milliards d’euros. Pour l’Ethiopie, 36 milliards d’euros investis en rapporteraient au final 206 milliards. Ces investissements favoriseraient également la création d’emplois : cela se traduirait « par une moyenne de 210 000 nouveaux emplois nets en Éthiopie, 98 000 au Kenya et 120 000 en Afrique du Sud d’ici 2050 ».
La Tech africaine, première de cordée ?
« Smart cities », « énergies propres », « transports écolos », « agriculture connectée » : c’est peu dire que la Tech africaine aurait sa partition à jouer. Prenons l’agriculture par exemple : le changement climatique aura un impact important sur la production. Face à cela, les petites exploitants (moins de deux hectares de cultures), ultra majoritaires sur le continent, auront besoin d’une capacité d’adaptation que la technologie peut permettre. Hello Tractor, pour la location de matériel, Pula, pour la micro-assurance d’appoint ou encore AgriEdge, pour l’agriculture assistée par satellite sont de celles-là. Début 2020, selon la GSMA, le groupement mondial des opérateurs téléphoniques, il existait 437 solutions d’Agritech en Afrique subsaharienne. « Une agriculture intelligente face au climat (AIC) est perçue comme une stratégie appropriée pour parvenir à la sécurité alimentaire tout en s’adaptant aux effets du changement climatique et en les atténuant », écrit ainsi la Banque mondiale.
Il en va de même de l’accès à électricité, un défi majeur en Afrique, où la moitié de la population est exclue des réseaux – le changement climatique a par ailleurs des effets sur la production de celle-ci, si l’on considère l’électricité hydraulique. L’une des solutions qui se développent sur le continent, et où s’engouffrent de nombreux entrepreneurs, est le off-grid, l’électricité hors-réseaux. « Les progrès des technologies liées aux énergies non polluantes peuvent permettre aux pays africains de sauter l’étape de modèles de fourniture d’électricité dépendante de carburants fossiles et centralisés », note là encore le rapport Africa’s Pulse. Mais il faudra encore une fois un soutien massif des gouvernants et des institutions internationales.