[Article issu de la Newsletter] Ils arrivent des quatre coins du monde. Mais surtout de Chine. Ils, ce sont les mineurs de bitcoin, qui voient dans l’Ethiopie un nouvel eldorado. Et pour cause, le pays, qui paradoxalement ne permet pas le commerce de crypto, leur a ouvert les bras depuis 2022 et le vote de plusieurs lois sur l’exploration de données, englobant la création de bitcoins. A cela s’ajoutent une énergie abondante et peu chère – principalement hydroélectrique – et un climat optimal.
Cette nouvelle immigration est en fait le fruit d’un double mouvement, car pendant que l’Ethiopie assouplissait ses conditions d’accueil, d’autres pays, comme la Chine ou l’Iran, fermaient la porte aux mineurs. Depuis, les projets privés se multiplient : Hashlabs Mining, ou encore le russe Bitcluster y ont posé leurs valises.
Il y a tout juste un mois, le pays est passé à la vitesse supérieure : Ethiopian Investment Holdings (EIH), le bras investisseur du gouvernement éthiopien, a signé un accord de principe avec West Data Group’s Center Service PLC, basé à Hong-Kong, pour lancer une opération de minage de bitcoin. Cette collaboration s’inscrit dans le cadre d’un projet ambitieux de 250 millions de dollars visant à établir une infrastructure de pointe pour le “minage de données” (le processus d’analyse de volumes massifs de données) et la formation en intelligence artificielle en Ethiopie.
Addis-Abeba est optimiste. L’intégration du minage de bitcoin dans l’économie éthiopienne pourrait contribuer de 2 à 4 milliards de dollars au PIB du pays, selon les données du Project Mano, un collectif qui conseille le gouvernement en la matière.
Avec un avantage, côté environnement : contrairement au Canada, ou au Texas, où les mines sont souvent adossées à des projets pétroliers ou gaziers, l’Ethiopie a un mix électrique intégralement renouvelable. Et la perspective de l’achèvement du barrage de la Renaissance, en 2025, devrait encore accroître la valeur du pays aux yeux des investisseurs.
Reste que la situation demeurera volatile. Plusieurs pays ont déjà, par le passé, fait volte face et déclaré les mineurs persona non grata. Et dans un pays où 40% des 120 millions d’habitants n’ont pas accès à l’électricité, la colère sociale peut vite éclater. “Les mineurs peuvent soudainement être considérés comme indésirables par le gouvernement et être contraints de partir”, reconnaissait Jaran Mellerud, directeur général de Hashlabs Mining, chez Bloomberg.