En Afrique, l’IA commence à bouleverser le quotidien des travailleurs du clic

Selon un tout récent rapport de la Banque mondiale, le nombre de travailleurs à la demande en ligne dans le monde se situerait entre 154 millions et 435 millions, soit entre 4,4% et 12,5% de la main-d’œuvre mondiale. Des chiffres colossaux qui cachent une multitude de réalités : sur RFI, Namita Datta, qui a dirigé cette étude, répartit l’ensemble des tâches concernées en deux catégories : « les “micro-tâches” qui ne prennent qu’une poignée de secondes à accomplir – par exemple identifier une voiture sur une image et cocher une case », et qui sont très faiblement rémunérées, et ce qui se rapproche plus du travail en freelance, comme la conception de sites web ou le développement d’objets graphiques. Mais l’IA est en train en transformer en profondeur ces activités.

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Avant, lorsque l’on voulait déléguer l’écriture d’une fiche produit, créer un logo, ou produire une animation, on s’adressait à des agences, locales ou sur internet, ou à des particuliers, pour peu que ceux-ci aient pignon sur web et une activité déclarée.

Puis sont arrivés Fiverr et une kyrielle d’autres sites (ComeUp, Upwork, 99designs…) du même type. Ce fut, pour le secteur, une première révolution : ces places de marché mondiales ont commencé à mettre en relation clients et créateurs en provenance du monde entier – une masse gigantesque de freelances parmi lesquels ceux qui affichaient les prix les plus bas bénéficiaient d’une belle visibilité. A ce jeu, les rédacteurs et designeurs venus des pays en développement, notamment d’Afrique, excellaient, bien que le résultat pouvait parfois laisser à désirer… Et avec la pandémie, leur nombre explosa.

Et puis, patatras. L’intelligence artificielle est arrivée. Enfin, gardons-nous de toute conclusion hâtive, mais force est de constater que ChatGPT, Bard et consorts ont rebattu les cartes. « Je pense que beaucoup de clients utilisent déjà des outils d’IA au lieu d’embaucher des rédacteurs », regrette Abisoye Otusanya-Azzan, une Nigériane de Lagos, sur le site Rest of World. Si les outils d’IA générative peuvent être de formidables outils d’appui à la rédaction ou à la conception graphique (Midjourney, DALL-E…), ils sont de plus en plus perçus comme de très sérieux concurrents.

Certains petits malins se sont quand même lancés dans le créneau, avec, à terme, une forte probabilité « d’e-anthropophagie » : ainsi voit-on désormais des annonces mirobolantes, boostées à l’intelligence artificielle, sur ces mêmes plateformes : « Un travailleur au Bangladesh permet à ses clients d’acheter jusqu’à 1 000 articles sur un sujet donné à la fois, relève encore Rest of World. Une commande de 120 articles générés par GPT-3 coûte 90$ et est accompagnée d’une garantie sans plagiat. » Difficile de rivaliser, pour n’importe quel humain de ce monde.

Des spécialistes auto-proclamés de l’IA déboulent au fil des mois, et pour cause : en janvier, Fiverr déclarait déjà avoir constaté une augmentation de 1400% des recherches d’offres d’emploi liées à l’IA sur sa plateforme au cours des six mois précédents. Mais parmi cette nouvelle élite des plateformes de micro-jobs, les places seront à leur tour très chères…

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