“J’ai dormi 11h de suite. Comme quoi, ça a du bon”, “un moment de sérénité”. En France, comme dans d’autres pays d’Europe ou aux Etats-Unis, la panne géante des réseaux sociaux Facebook et Instagram, et des messageries Messenger et WhatsApp (tous propriétés de Facebook), a été plutôt perçue avec une forme de légèreté. Rebelote vendredi soir, avec une nouvelle interruption des services. Mais dans d’autres pays, notamment en développement, ce fut une autre affaire. Il en va ainsi en Afrique, où ces plateformes sont devenues des vecteurs incontournables pour la vente et la consultation d’information. Ainsi cette semaine, entrepreneurs et journalistes africains n’étaient pas à la fête.
Commençons par l’accès à l’information. De manière générale, Facebook reste le premier réseau social au monde pour s’informer. Bien qu’en baisse, les chiffres du dernier rapport du Reuters Institute sont éloquents : le réseau social de Marc Zuckerberg est utilisé chaque semaine par 32% des internautes à travers le monde pour accéder à l’actualité. Bien loin devant YouTube (20%), WhatsApp (17%) ou encore Twitter (11%). L’échantillon était pris ici sur douze pays du globe, en omettant le continent africain.
Mais à l’échelle de l’Afrique, les chiffres sont plus vertigineux encore. Toujours selon le rapport, 60% des Africains sondés (sur trois pays : Nigeria, Kenya et Afrique du Sud) ont utilisé au moins une fois Facebook au cours de la semaine écoulée pour s’informer. Même proportion pour WhatsApp. Des chiffres bien plus importants que dans les autres parties du monde.
Au Nigeria, pays le plus peuplé du continent avec plus de 210 millions d’habitants, les réseaux sociaux et messageries de Mark Zuckerberg sont particulièrement plébiscités : respectivement 63% et 65% des Nigérians utilisent Facebook et WhatsApp pour s’enquérir des nouvelles fraîches. Tout cela pour montrer que si vous coupez l’accès à ces plateformes, ne serait-ce que quelques heures, l’impact sur l’information des populations n’est pas négligeable.
Des commerçants africains à la peine
Il en va de même pour les entrepreneurs africains, dont les affaires dépendent parfois beaucoup de ces plateformes. Facebook, mais aussi Instagram et WhatsApp sont devenus des intermédiaires directs entre vendeurs et clients. Interrogé par les Observateurs de France 24, un commerçant sénégalais explique ainsi que son chiffre d’affaires a été sérieusement affecté par la panne de lundi : “Nous faisons habituellement un chiffre d’affaires de 300 000 francs CFA [environ 450 euros] essentiellement avec notre boutique en ligne sur Facebook. Mais hier, nous avons eu seulement 50 000 francs [environ 75 euros] de commande à livrer aujourd’hui.”
Même son de cloche au Zimbabwe, où un vendeur de vêtements d’Harare affirmait avoir reçu “un coup dur” : “Maintenant, nous dépendons de la publicité en ligne, et la plupart de nos clients n’ont accès qu’à Facebook et WhatsApp.”
C’est que le “commerce social” se développe rapidement sur le continent. Une étude en date de juin 2020 réalisée par Caribou Data et le Partenariat pour la finance dans une Afrique numérique en a montré l’importance au Kenya : “92 % des TPE de notre panel ont utilisé des applications sociales telles que Facebook, WhatsApp, YouTube ou Instagram pour assurer leurs fonctions commerciales, tandis que 27% seulement ont utilisé des plateformes officielles telles que Jumia ou Upwork”, peut-on ainsi lire dans le document.
Une croissance qui connaît néanmoins quelques obstacles notables, comme l’a montré une récente étude réalisée pourtant dans le sud-ouest du Nigeria, dans la région de Lagos : “Les entreprises africaines pourraient également bénéficier des fonctionnalités et de la popularité de ces plateformes, bien que l’utilisation des médias sociaux varie considérablement d’une région à l’autre du continent”, juge ainsi le chercheur nigérian Babatunde Omotosho. (Photo :
Greg Bulla / Unsplash)