Les nanotechnologies sont l’un des moteurs de la quatrième révolution industrielle. Le marché mondial des produits issus des nanotechnologies représentait environ 1 600 milliards de dollars en 2014. Selon une estimation, ce secteur pourrait générer 6 millions d’emplois et représenter 10% du PIB mondial d’ici à 2030.
Les nanotechnologies permettent de créer, d’utiliser et d’étudier des matériaux à l’échelle du nanomètre, soit un milliardième de mètre. Certains de ces matériaux existent dans la nature. L’ADN, les protéines et les virus en sont des exemples. D’autres peuvent être créés en découpant des molécules plus grosses en molécules plus petites ou en assemblant des atomes en nanoparticules.
Les nanomatériaux présentent des caractéristiques physiques, optiques, biologiques, chimiques, électriques et mécaniques particulières. Le graphène, par exemple, est un nanomatériau très léger mais plusieurs centaines de fois plus résistant que l’acier.
Le domaine des nanotechnologies s’est développé pour englober la physique, la chimie, l’ingénierie, la biologie et la science des matériaux. Il trouve des applications dans l’agriculture, l’industrie, la médecine, l’environnement et les produits de consommation.
Parmi les acteurs qui investissent le plus dans les nanotechnologies, on retrouve les États-Unis, le Japon, l’UE et la Corée du Sud. Si l’on ajoute la Chine, ces régions représentaient 72,12 % des brevets de nanotechnologies en 2016, d’après le bureau américain des brevets et des marques. Le Brésil, la Russie et l’Inde sont également très actifs.
En Afrique, l’Égypte, l’Afrique du Sud, la Tunisie, le Nigeria et l’Algérie sont en tête du peloton. Depuis 2006, l’Afrique du Sud forme des scientifiques, fournit des infrastructures, crée des centres d’excellence, élabore une politique nationale et fixe des normes réglementaires dans le domaine. On y trouve des entreprises telles que Mintek, Nano South Africa, SabiNano et Denel Dynamics.
En revanche, le voyage du Nigeria dans le domaine des nanotechnologies, qui a débuté par une initiative nationale en 2006, a été lent. Il a été marqué par des incertitudes, un financement insuffisant et un manque de coordination. Pourtant, les scientifiques nigérians ont continué à participé à la reconnaissance du pays dans cette discipline grâce à leurs publications.
En outre, des groupes de recherche à l’université du Nigeria, à Nsukka, à la Ladoke Akintola University of Technology et d’autres établissements ont organisé des conférences. Notre groupe de recherche a également fondé une revue en accès libre, Nano Plus: Science and Technology of Nanomaterials.
Les nanotechnologies au Nigeria
Pour nous rendre compte des performances du Nigeria en matière de recherche et de développement dans les nanotechnologies, nous nous sommes tournés vers SCOPUS, une base de données universitaire.
Notre analyse montre que la recherche en nanotechnologies se déroule dans 71 institutions nigérianes en collaboration avec 58 pays. Le Nigeria se classe au quatrième rang des articles de recherche publiés entre 2010 et 2020, après l’Égypte, l’Afrique du Sud et la Tunisie. L’Afrique du Sud, la Malaisie, l’Inde, les États-Unis et la Chine apparaissent comme sont les principaux collaborateurs des chercheurs nigérians.
Cinq institutions ont contribué à 43,88% des articles du pays au cours de cette période. Il s’agit de l’Université du Nigeria, à Nsukka, de la Covenant University, à Ota, de la Ladoke Akintola University, à Ogbomoso, de l’université d’Ilorin et de l’université de Lagos.
Au cours de la même décennie, le nombre d’articles publiés par les chercheurs nigérians était de 645. La production annuelle est passée de cinq articles en 2010 à 137 au premier semestre 2020. A titre de comparaison, l’Afrique du Sud a publié 2 597 articles et l’Égypte 5 441 entre 2010 et 2020. Le total mondial était de 414 526 articles.
Les chiffres montrent une croissance régulière des publications du Nigeria. Mais les performances sont faibles, alors que le pays compte le plus grand nombre d’universités en Afrique.
Un résultat qui n’est pas non plus au niveau par rapport à la population du pays et à la taille de l’économie. Le Nigeria a produit 1,58 article pour 2 millions d’habitants et 1,09 article pour 3 milliards de dollars de PIB en 2019. L’Afrique du Sud, de son côté, a enregistré 14,58 articles pour 2 millions d’habitants et 3,65 pour 3 milliards de dollars. L’Égypte, elle, a publié 18,51 articles pour 2 millions d’habitants et 9,20 pour 3 milliards de dollars au cours de la même période.
Il n’existe aucun brevet de nanotechnologie d’origine nigériane enregistré au bureau américain des brevets. Les normes n’existent pas pour les produits à base de nanotechnologies. Là où l’Afrique du Sud, par exemple, a obtenu 23 brevets en cinq ans, de 2016 à 2020.
La recherche nigériane sur les nanotechnologies est limitée par le manque de matériel d’analyse sophistiqué., sans quoi il est impossible pour les chercheurs nigérians de mener des recherches significatives localement sans collaboration étrangère. L’absence de politique nationale en matière de nanotechnologies et de fonds dédiés entrave également la recherche.
Les bienfaits des nanotechnologies
La taille de l’économie nigériane laisse entrevoir un grand potentiel pour la recherche et le développement de brevets et de produits.
Les nanotechnologies profiteraient au Nigeria de plusieurs manières. Dans l’agriculture, les nanomatériaux peuvent être exploités comme engrais à libération lente et agents écologiques contre les parasites et les maladies. Il existe également des applications dans la production d’énergie renouvelable et propre, par le biais des biocarburants et des panneaux solaires.
Dans le domaine de la sécurité en entreprise, les nanomatériaux présents dans les terminaux et les véhicules peuvent améliorer la protection des employés. Par exemple, il y a un vrai potentiel pour des uniformes intelligents dotés d’une protection contre les rayons ultraviolets, de propriétés antimicrobiennes, d’un camouflage et d’une résistance à l’eau et au feu.
Les nanomatériaux peuvent rendre l’eau potable sûre par la désinfection et l’élimination des polluants chimiques. Dans le domaine de la santé, les nano-tissus antimicrobiens peuvent contribuer à prévenir les infections nosocomiales.
Ce sont autant d’applications dans lesquelles le Nigeria peut utiliser les nanotechnologies pour atteindre les objectifs de développement, tels que l’éradication de la pauvreté et la promotion d’une industrialisation durable.
Comment progresser dans les nanotechnologies
En février 2018, le ministre nigérian des Sciences et des Technologies a lancé un comité de direction national sur la politique en matière de nanotechnologies, dont le mandat doit encore être approuvé par le gouvernement fédéral. En septembre 2021, j’ai présenté un mémorandum au conseil national sur la science, la technologie et l’innovation pour stimuler le discours national sur les nanotechnologies.
D’après moi, le gouvernement devrait mettre en œuvre les résultats de ces efforts sans tarder. Il peut :
- lancer une politique nationale
- créer une agence chargée de coordonner sa mise en œuvre
- dégager des fonds pour les infrastructures
- créer un centre d’excellence de la recherche en nanotechnologies
Les partenaires commerciaux et diplomatiques du pays peuvent apporter leur aide. Le secteur privé a également un rôle à jouer, tel que fournir des fonds pour la recherche, offrir des bourses d’études ou faire don de matériel. L’adoption des nanotechnologies dans les activités commerciales favorisera également leur développement au Nigeria.
Cet article d’Agbaje Lateef a été initialement publié sur le site The Conversation à cette adresse et traduit par l’équipe de Teknolojia.