On avait l’habitude des initiatives de Facebook contre les campagnes de désinformation en Afrique provenant de la Russie. Un peu moins de la France. Pourtant, le réseau social a annoncé, mardi 15 décembre, avoir mené des actions contre des trolls agissant pour le compte des autorités des deux pays. Dans un post, le géant californien précise ainsi avoir supprimé trois réseaux pour « comportement inauthentique coordonné (CIB) au nom d’une entité étrangère ou gouvernementale ». Deux russes et un français. Au total, un demi-millier de comptes et pages ont été bannis.
Le terrain d’affrontement ? Le Moyen-Orient mais surtout l’Afrique, où plus d’une douzaine de pays étaient concernés par une guérilla permanente par faux comptes interposés. Parmi mieux, l’Algérie, la Libye, le Cameroun ou encore la Centrafrique, qui organise le 27 décembre sa présidentielle. « Bien que nous ayons déjà vu des opérations d’influence cibler les mêmes régions dans le passé, c’est la première fois que notre équipe constate que deux campagnes – française et russe – s’engageaient activement l’une envers l’autre », écrit Facebook
La RCA et le Mali dans le collimateur des trolls français
Du côté de la campagne « française », plus de 80 pages ont été supprimées. Celles-ci – et quelques comptes – ciblaient particulièrement le Mali et la Centrafrique et, dans une moindre mesure, le Niger, l’Algérie, le Burkina Faso ou la Côte d’Ivoire.
Ces pages et comptes publiaient des contenus sur des événements d’actualité, notamment « sur la politique de la France en Afrique francophone, la situation sécuritaire dans divers pays africains, des allégations d’interférence potentielle de la Russie dans les élections en République centrafricaine, des commentaires de soutien sur l’armée française et des critiques sur l’implication de la Russie en RCA ».
Par ailleurs, certains des individus derrière ces publications seraient liés, selon le réseau social, à l’armée française. Sollicité par Reuters, le ministère français des Armées n’a pas souhaité faire de commentaires.
Des centaines de publications supprimées côté russe
Du côté des réseaux russes, ce sont plusieurs centaines de pages, groupes et comptes (y compris Instagram), qui ont été supprimés. L’un de ces réseaux partageait un même terrain d’influence que les trolls français, celui de la Centrafrique, même si l’Afrique du Sud, Madagascar ou encore le Mozambique étaient concernés. Ses sujets de prédilection : le Covid-19 et le vaccin russe, les prochaines élections dans le pays, le terrorisme, la présence de la Russie en Afrique subsaharienne, et la politique intérieure centrafricaine – avec des commentaires élogieux sur l’action gouvernementale. Ce premier réseau militait clairement pour la réélection du président Touadéra.
Le second réseau se focalisait plus particulièrement sur des pays marqués par une grande instabilité sécuritaire, comme la Libye ou la Syrie. En Libye par exemple, ces pages et comptes, parfois tués dans l’oeuf par Facebook, glorifiaient l’action du maréchal Haftar (soutenu par Moscou) et critiquaient l’influence de la Turquie. Au total, plus de 120 pages de ce réseau ont été supprimées.
Dans les deux cas, Facebook pointe la responsabilité de l’Internet Research Agency, une organisation de cyber-propagande russe basée à Saint-Pétersbourg.
Dans leur dernier rapport, le cabinet Control Risks et NKC African Economics, filiale d’Oxford Economics constataient que de plus en plus d’« acteurs externes » menaient des opérations de désinformation en Afrique. Ces dernières années, Facebook a mené plusieurs actions contre des campagnes d’influence en provenance, majoritairement, de Russie et du Moyen-Orient sur le continent.