Il y a un peu plus d’un an, le 5 juin 2021, Abuja ordonnait la suspension de Twitter. Une décision prise à la suite d’une énième montée de tension entre le pouvoir nigérian et le réseau social : ce dernier avait supprimé un tweet du président Buhari (photo) qui menaçait les responsables de violences dans le sud-est du pays. L’initiative de trop, après des mois de soutien au mouvement #EndSARS contre les violences policières. Résultat : sept mois de silence. Et puis en début d’année, l’éclaircie, enfin. Twitter faisait son retour au Nigeria, après s’être plié à toutes les injonctions du pouvoir (lire notre article).
La court de Justice de la Cédéao, saisie, a fini par rendre son verdict. Le 14 juillet dernier, l’instance judiciaire de l’organisation régionale ouest-africaine a jugé que cette suspension était illégale et violait les dispositions de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) et du Pacte international relatif aux droits civils et droits politiques (PIDCP). La Cour a aussi ordonné au gouvernement de garantir que cette interdiction ne se reproduirait pas.
Même a posteriori, c’est une victoire pour les défenseurs de la liberté d’expression au Nigeria, en particulier pour le Projet sur les droits socio-économiques et la responsabilité (SERAP), une ONG fondée en 2004 et qui avait porté l’affaire devant le justice avec d’autres collectifs. « Nous félicitons la Cour de la Cédéao pour [ce] jugement historique, a déclaré une avocate de l’association. […] Les juges ont unanimement confirmé les droits humains des citoyens à la liberté d’expression et à l’accès à l’information. La liberté d’expression est un droit humain fondamental et la pleine jouissance de ce droit est essentielle à la réalisation de la liberté individuelle et au développement de la démocratie. »
Le Serap appelle aussi à ce que le gouvernement nigérian, mais aussi d’autres en Afrique, suivent les recommandations de la Cour. « Nous espérons que les chefs d’État et de gouvernement des États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest respecteront et défendront désormais le droit à la liberté d’expression garantie par l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. » Un appel relayé par d’autres ONG, comme Media Right Agenda qui demande de véritables garanties par les autorités. (Photo : GovernmentZA / Flickr / CC)